dimanche, mai 31, 2009

Entre Hergé & Magritte...

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Les inaugurations presque simultanées du Musée Hergé & du Musée Magritte font la une de l'actualité culturelle belge depuis plus d'une semaine. De la Bande Dessinée, du Surréalisme, de la Belgitude, voilà donc l'occasion de parler de trois albums parus récemment chez trois éditeurs alternatifs de notre plat pays.
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L'employé du Moi nous propose Airpussy de la dessinatrice allemande Ulli Lust. Ce joli petit ouvrage muet se définit comme "un rituel printanier contemporain, dessiné à la fin de l'hiver et publié au printemps" et traduit l'éclosion du plaisir féminin au travers de la quête sensuelle de son héroïne. Les préliminaires se succèdent au fil des pages tandis que les chairs se gonflent de désir pour enfin laisser place à l'éruption des sens et à la célébration du renouveau. Le style d'Ulli Lust a la légereté d'un macaron de Pierre Marcolini (pour rester dans les références locales) et se déguste donc comme une véritable friandise.
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A l'annonce de chaque nouveau récit de Gipi , je ne peux plus contenir mon impatience. Comme un lutteur sur son adversaire, je me jettai donc sur l'ouvrage collectif intitulé Match de Catch à Vielsalm pour y lire les planches du maître italien que je chéris tant. Après avoir été moyennement convaincu par Ma Vie mal Dessinée chez Futuropolis, j'ai été ici emballé par la petite trentaine de pages qu'il a conçue avec l'artiste belge Jean-Jacques Oost. Mais au-delà de leur touchante Bataille des Ardennes, c'est l'ensemble de ce collectif qui doit être salué pour la qualité de sa facture. Les six récits graphiques qui la composent sont réalisés par des binômes formé d'un artiste porteur d'handicap et d'un auteur de bande dessinée. Le résultat est parfaitement présenté sur la quatrième de couverture: "dans les éclats de récits composés à quatre mains, vous verrez handicap et non-handicap disparaître sous les coups de Hulk Hogan et Jean-Claude Van Damme, sous le feu de vaillants soldats des Ardennes, sous les scalpels de chirurgiens fantômes, ou tout au fond de petits nids douillets. Littérature graphique brute, bande dessinée outsider, plaisir pur... vous n'aurez pas à choisir!" La rencontre de quelques grands noms du FREMOK (Vincent Fortemps, Dominique Goblet, Olivier Deprez, Thierry Van Hasselt), de Gipi et des artistes du centre d'art CEC LA HESSE donne effectivement à voir tout cela. Et à dépasser tout ce que l'on voit.
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William Henne nous propose une autre forme d'exploration du récit avec Les Songes (Reliefs) paru à la Cinquième Couche. L'auteur y retranscrit dix de ses rêves, chacun bénéficiant d'un traitement graphique particulier. On aurait pu craindre que ce mélange de styles ne nuise à l'ouvrage mais l'hétérogénéité s'accorde parfaitement à la tonalité du recueil. Peinture, crayon, dessin "vectoriel" informatique ou fusain servent avec justesse les ambiances étranges de ces récits oniriques. Le livre révèle, comme le Cheval Blême de David B ou les Hypnagogic Reviews d'Aleksandar Zograf, un univers intime et personnel fait de motifs récurrents et révélateurs de malaises plus ou moins enfouis. Ce travail de William Henne contribue brillament au défrichage de ce vaste continent encore trop peu exploré que celui des songes dont la valeur autobiographique n'est plus à démontrer.

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