lundi, avril 09, 2007

Notes de lecture (VII): mi-avril 2007

©2007 Vertige/Coconino/Delcourt/Glénat/La Cerise & les auteurs respectifs


1. Massacre au Pont de No Gun Ri de Park Kun-Woong & Chung Eun-young chez Vertige Graphic/Coconino Press (sur BulleDair.com: ICI)

Je suis assez surpris de m'apercevoir que depuis sa sortie cet album n'a attiré sur lui aucune attention particulière (cfr. par exemple le peu de notes sur BulleD'air.com). Il vaut pourtant le détour. J'ai joint ci-dessous la chronique que j'ai écrite pour la librairie:

"Juin 1950: la Corée du Nord envahit son voisin du Sud. Un exode massif des populations civiles s'ensuit. L'album nous propose de découvrir le parcours d'une famille qui se trouvera rapidement séparée dans le chaos provoqué par la débacle de son armée et de leurs alliés américains. Cet ouvrage expose aussi et sur près de 300 pages les témoignages des 25 survivants du Massacre de No Gun Ri. Durant trois jours, une vingtaine de soldats US (alliés!?)vont exterminer 400 civils -hommes, femmes et enfants- sous les deux arches d'un pont ferroviaire. Aucun détail ne sera épargné au lecteur comme rien n'a été épargné aux familles innocentes prises dans cet enfer. L'adaptation en bande dessinée du livre de Chung Eun-young par l'auteur de Fleurs (Casterman Ecritures) est un devoir de mémoire des plus forts".

Malgré un problème de rythme en début de récit (quelques longueurs), je ne peux que vous conseiller sa lecture.

Informations sur le site du Nomade
Informations historiques complémentaires



2. Entre-Deux de Vincent Perriot aux éditions de La Cerise (sur BulleDair.com: ICI)

Vincent Perriot? C'est une bonne grosse claque! Son album Entre-Deux fait partie de ces "ovni" du Neuvième Art qui comble le lecteur en quête d'émotions nouvelles. L'auteur enchaîne une quarantaine d'illustrations "pleine page" (et autant de dessins interstitiels) qui décomposent le parcours de deux jeunes femmes qui se sont embarquées sur les routes de France au volant d'une décapotable. Ce "road-movie" (je n'aime pas ce terme mais je n'ai pas mieux) nous offrent des instantés de leur voyage qui semble n'avoir pour but que de combler leur oisiveté. L'auteur fait preuve d'une superbe maîtrise de l'ellypse et l'on s'amuse à se figurer tous ces moments qui font l'Art Invisible (ah lyrisme quand tu me tiens). Mais ce qui m'aura sans doute touché avant tout, c'est bien le réalisme magique qui émane de ces somptueux dessins. Chacune de ses illustrations nous projette en effet dans un univers teinté d'onirisme. Son style graphique n'a rien a envié à un Blutch (c'est dire) et je vous invite donc à vous jetter sur le premier album d'un auteur avec qui il faudra désormais compter!

Plusieurs histoires courtes et de superbes carnets de croquis de Vincent Perriot sont disponibles sur le site Coconino World



3. Robinson Crusoé de Daniel Dafoe (volume 1) de Christophe Gaultier chez Delcourt (Ex-Libris) (sur BulleDair.com: ICI)

Parlons peu mais parlons Blain (mince, on se croirait dans le forum de Bulle d'Air). J'ignore si l'auteur apprécie qu'on compare son style à celui de Christophe Blain ou son Robinson Crusoé à Isaac le Pirate mais si je me permets de le faire ici, c'est sous la forme d'un compliment. Car Christophe Gaultier nous propose une oeuvre personnelle et si elle devait être comparée à celle de l'auteur de Gus, c'est avant tout pour insister sur une qualité qu'ils ont en commun; celle de maîtriser le rythme propre aux récits d'aventure. Dans la narration ou dans le trait, Christophe Gaultier révèle en effet un talent certain pour rendre la magie du genre. Son adaptation du Robinson Crusoé de Daniel Dafoe le prouve à merveille. L'auteur aborde le récit avec beaucoup d'intelligence. Il n'opte pas pour des raccourcis faciles et préfère installer son personnage comme il se doit. Ainsi nous n'apercevrons aucune île dans ce premier tome mais nous partagerons plutôt les déboires d'un jeune Robinson qui aspire au grand large alors qu'il ne semble pas du tout taillé pour l'aventure. Christophe Gaultier a réussi à rendre le caractère profondément humain de son personnage au travers de ses contradictions, de ses peurs et de ses désillusions.

L'auteur sera en séance de dédicaces à la Bulle d'Or le jeudi 26 avril (cfr. message précédent).



4. Abara (volume 1) de Tsutomu Nihei chez Glénat (sur BulleDair.com: ICI)

Tsutomu Nihei, c'est Blame. Et Blame, c'est une des rares séries en manga qui aura su captiver mon intérêt ces dernières années. Si j'ai un peu regretté une fin "héroïc-fantasy" à ce chef d'oeuvre de science-fiction, j'ai par contre été entièrement comblé par le style de l'auteur. Ses dessins sont superbes; du cypberpunk à l'état brut. La richesse visuelle de ses univers lui permet de se laisser aller à des centaines de planches muettes dans lesquelles il laisse évoluer lentement son personnage sans jamais mener son lecteur à l'ennui. Et dès qu'une scène d'action éclate (et c'est le terme approprié), il opte pour des ellypses radicales (je crois d'ailleurs qu'avec Jason, il est l'un des seuls auteurs à oser une telle démarche). Sur un "spectre de la scène d'action", il se trouverait à l'opposé de l'Akira d'Otomo Katsuhiro. Loin d'une approche "cinématographique", Nihei préfère figurer le bras qui se tend et de suite l'adversaire projetté contre un mur sans représenter le coup. Avec Abara, l'auteur nippon repart dans une série cyberpunk qui promet d'être épique. Je reprocherais seulement un manque de clarté dans la mise en place du récit puisque Nihei ne s'attarde pas sur la présentation de ses nombreux personnages et de son univers complexe. J'espère que le second tome sera plus fluide.

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